Illustration Diplômé

Rénovation des diplômes, les enjeux du post-bac avec Michel Lugnier

 

par Sylvie Soubes in L’Hôtellerie Restauration

 

La rénovation des diplômes se poursuit depuis cinq ans. Michel Lugnier, inspecteur général de l’Éducation nationale, revient sur les enjeux post-bac.

 

Michel Lugnier

Michel Lugnier

L’Hôtellerie Restauration : Quelle analyse faites-vous des diplômes rénovés en CHR ?

Michel Lugnier : Parallèlement aux évolutions qui ont affecté le niveau IV – je rappelle que le baccalauréat professionnel ainsi que les deux brevets professionnels ont été réformés respectivement en 2011 et en 2015 – nous avons également engagé, avec les professionnels, une refonte complète de toutes les certifications de niveau V. C’est dans ce cadre que le nouveau CAP « cuisine » est entré en vigueur à la rentrée 2016, tandis que le travail de rénovation et de réflexion qui s’est poursuivi avec les autres CAP a permis la mise en place à la présente rentrée du CAP « Commercialisation et Services en Hôtel-Café-Restaurant » lequel se substituera aux CAP « restaurant », « café-Brasserie » et « services hôteliers ».  Concernant le CAP APR (Agent polyvalent de restauration) qui a rejoint plus récemment la 17ème CPC,  une réflexion de fond est engagée en vue de le rénover et de l’adapter notamment au secteur de la restauration collective. Toutes ces rénovations sont récentes. Elles nécessitent du temps pour  les enseignants auxquels je veux ici rendre un hommage appuyé s’approprient les référentiels mais aussi et surtout l’esprit qui anime ces réformes. J’observe néanmoins que cette « réforme d’ensemble » n’a été rendue possible que par un engagement conjoint exemplaire de la part des professionnels et des personnels du ministère de l’éducation nationale. Je forme le voeu que cela se poursuive !

 

Comment résumeriez-vous aujourd’hui le bac STHR ?

La série STHR constitue la première étape d’un parcours de formation visant à former des personnels capables, après une formation supérieure, de servir les métiers d’encadrement et de direction des unités hôtelières. La finalité de poursuite d’études de cette série, conformément aux autres séries technologiques, impose un niveau de culture générale en phase avec les évolutions les plus récentes qui ont concerné l’ensemble des disciplines ainsi qu’une polyvalence plus importante. Il s’agit notamment de mieux préparer les élèves à une poursuite d’étude dans l’enseignement supérieur notamment au sein des formations dédiées au secteur HR qui sont actuellement au centre des travaux que nous conduisons avec les professionnels. Les textes relatifs à la définition des épreuves ainsi que les sujets « zéro » ont fait l’objet d’une consultation des représentants du personnel dès le mois d’avril conformément aux engagements que nous avions pris et d’une publication officielle début juillet. La première promotion de bacheliers STHR prévue pour juin 2018 devrait ainsi pouvoir intégrer des BTS totalement rénovés et destinés à leur offrir des poursuites d’études adaptées et par là même les conditions de la réussite.

 

Comment  allez-vous aborder la rénovation des BTS du secteur de l’hôtellerie et de la restauration ? Avec quels objectifs ?

Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration se caractérise par une évolution rapide des comportements, des besoins et des attentes des clients, dans un contexte de digitalisation et de concurrence accrue. En matière d’encadrement, l’élévation du niveau d’information des clients, les exigences en matière de qualité et d’originalité des services offerts… impliquent une technicité croissante du manageur opérationnel. Outre la maîtrise technique, la capacité d’adaptation devient un facteur important d’employabilité et d’évolution professionnelle. Afin de répondre aux enjeux liés au management de proximité, une refonte complète des actuels BTS a été engagée par la 17ème CPC. Cette rénovation concerne le BTS « Hôtellerie-Restauration » dont la particularité tient à l’existence d’une première année commune aux deux options (option A : Gestion et Mercatique Hôtelière ; option B : Art culinaire, Art de la table et du Service) et le BTS « Responsable-Hébergement » à référentiel commun européen.  Ces BTS devraient être remplacés à la rentrée 2018 par un BTS « Management en hôtellerie- restauration » constitué d’une première année commune puis d’une deuxième année caractérisée par une forte professionnalisation au sein de l’une des trois options : Option A – Management des unités de restauration ; Option B – Management des unités de production culinaire ; Option C – Management des unités d’hébergement.  Les contenus de formation du nouveau BTS à trois options sont en cours de rédaction. Ils sont directement issus du référentiel des activités professionnelles élaborés avec les professionnels dont je salue ici l’engament et l’esprit qui l’anime. Ces contenus prendront appui sur le programme de la série STHR offrant par là-même une poursuite d’études adaptée aux élèves engagés dans la série STHR. Parce que le technicien ou la technicienne supérieur(e) en management de l’hôtellerie et de la restauration doit disposer d’une solide culture professionnelle indispensable à l’exercice de ses fonctions les formations qui conduisent à l’obtention de ces BTS intégreront également des dimensions liées à l’apprentissage des langues,  au pilote d’unité d’hôtellerie-restauration ou encore à l’entreprenariat. Certaines dimensions seront en outre renforcées. Je pense notamment à la sommellerie pour l’option A ou encore au contenu de la mention complémentaire MCCDR pour l’option B. Quant à la MAN, son programme sera revisité et lui aussi adossé à celui de la série STHR.

 

Va-t-on vers une suppression des MAN ?

Non, la suppression des MAN n’a jamais été d’actualité ! Depuis près de cinq ans, date du lancement officiel de la rénovation de la série technologique STHR, je donne invariablement la même réponse. L’absence d’alternatives en matière de poursuite d’études spécifiques au secteur d’activité de type DUT ou autres, confère aux BTS HR et RH un rôle particulier au sein du dispositif de  formation supérieur[1]. Le BTS constitue, en effet, la seule possibilité pour un jeune ayant suivi un enseignement technologique relevant de l’hotellerie-restauration de poursuivre sa formation dans ce secteur. Or, chaque année, plusieurs milliers de jeune en provenance notamment de l’enseignement général postulent pour une mise à niveau (MAN), contournant ainsi la série technologique. Les élèves issus de MAN représentent, à l’échelle nationale, le premier flux d’entrée en STS. Il en résulte pour les élèves de l’enseignement technologique que certains d’entre eux ne peuvent accéder en STS alors même qu’ils en font la demande tandis que d’autre s’interdisent purement et simplement une poursuite d’études préférant pour nombre d’entre eux une spécialisation en mention complémentaire. Dans le même temps, certains établissements mobilisent des moyens importants sous une forme ou une autre pour mettre à niveau les élèves issus de la voie professionnelle qui  souvent jeunes ne peuvent ou ne veulent pas s’insérer immédiatement sur le marché du travail. Or, des solutions existent pour les élèves de l’enseignement professionnel à l’instar des mentions complémentaires qui offrent pour de nombreux jeunes des opportunités de spécialisation appréciées. Or, celles-ci sont prisées et investies par des élèves de niveau IV et surtout de niveau III ; les jeunes de l’enseignement professionnel se trouvant dès lors contraints de poursuivre en BTS. 
C’est donc tout l’enjeu des réformes conduites conjointement dans l’enseignement professionnel et dans l’enseignement technologique hôtelier que de redessiner l’articulation entre les diplômes des différents niveaux pour s’assurer d’une bonne cohérence au sein de la filière. L’objectif est de rendre lisibles et complémentaires les multiples certifications et spécialités du secteur de l’hôtellerie-restauration (CAP, BP, baccalauréats technologique et professionnels, mentions complémentaires, BTS…) afin de permettre aux jeunes et aux familles de mieux appréhender ces formations ainsi que les débouchés d’un secteur d’activité dont les métiers sont en constante évolution.

 

[1] Les diplômes de niveau III du secteur de l’hôtellerie-restauration sont les deux brevets de techniciens supérieurs (BTS) :

– d’une part, le BTS Hôtellerie-restauration dont l’arrêté de création date du 3 septembre 1997 (création du BTS et fixation des conditions de délivrance) ;

– d’autre part, le BTS Responsable de l’hébergement à référentiel commun européen dont l’arrêté de création date du 7 août 2003.