Viticulture Grecque

À la rencontre des artisans de la viticulture grecque

 

par Fabien Humbert in La revue des vins de France

 

Le 29 mai prochain, des vignerons grecs travaillant en bio ou en biodynamie, cultivant des cépages autochtones et apôtres du pressurage doux, se réunissent pour la première fois pour un « Banquet » ouvert au public, au Pavillon du Lac au cœur du parc des Buttes Chaumont à Paris.

 

« Les vignes de l’ile de Santorin, toutes franches de pied sont conduites pour pousser à ras de terre, afin de résister au vent » explique Georgios Ioannidis.

 

C’est à un salon qui fleure bon les vacances que les Parisiens sont conviés le 29 mai au Pavillon du lac, au cœur des Buttes Chaumont dans le 19e arrondissement. Près d’une quinzaine de petits producteurs et de vignerons grecsdébarqueront pour la première fois dans la capitale française, pour faire découvrir des pépites gastronomiques, sélectionnées par l’importateur « Profil Grec », et viticoles, issues de leurs productions de la région de Kalamata (Sud du Péloponnèse), et d’autres teroirs grecques.

 

Pour 5 euros seulement l’entrée, les amateurs de plaisirs dionysiaques pourront ainsi déguster des spécialités comme le thon mariné, la fêta fraîche, mais aussi des cuvées venues de contrées dont le simple nom fait rêver les férus d’histoire, ou simplement de vacances au soleil : Santorin, Péloponnèse, Cyclades, Crète…

 

C’est l’importateur grec Georgios Ioannidis, qui s’est occupé de la sélection des vins de l’évènement. « Nous ne distribuons que des vins qui répondent à un cahier des charges très précis, raconte le fondateur de la société Oenos. Ce sont des vins en bio ou en biodynamie, issus de cépages autochtones (ils sont près de 300 référencés en Grèce comme l’assyrtico, l’aidani ou le robola), ayant été lentement extraits et n’ayant reçu que peu d’intervention au chai. »

 

En revanche, ne parlez pas à Georgios des vins natures. Lui préfère parler de méthodes « doucement naturelles ». Quant au souffre, ce grec qui vit dans le 18e arrondissement de Paris, soutient que le vin en a besoin, à des doses maîtrisées, et que, lorsqu’il est d’origine volcanique, c’est un produit naturel.

 

 

DES VIGNES FRANCHES DE PIED

 

La Grèce viticole présente plusieurs particularités. D’abord une grande partie de son vignoble est en francs de pied, c’est-à-dire que contrairement à ce que l’on trouve en France, les pieds de vignes ne sont pas greffés sur des porte-greffes américains. Pourquoi le phylloxéra n’a-t-il pas attaqué les vignes grecques ? » En fait, on ne sait toujours pas avec certitude pourquoi le phylloxéra attaque, ou n’attaque pas des vignes, s’étonne Georgios Ioannidis. Il y a des facteurs connus cependant, Santorin, dont le terroir est composé de roches volcaniques, semble par exemple protégé, au contraire des terroirs qui contiennent de l’argile en quantité.

 

L’insularité semble aussi être une bonne protection. « La Grèce est un pays sismique et volcanique, très montagneux et rocheux (pierres volcaniques, calcaire, schiste…). C’est un pays du Sud en termes de latitudes, mais en termes viticoles il a des caractéristiques communes avec certains pays d’Europe Centrale. C’est pourquoi on trouve des acidités très importantes dans les vins grecs, même en Crète qui est pourtant l’extrême Sud du pays, et même de l’Europe. « On trouve dans le vin grec des acidités comparables aux vins autrichiens ! », nous apprend Georgios.

 

DES VIGNES EN GOBELET

 

De même, les vignerons traditionnels n’utilisent pas le système du palissage, ils dirigent leurs vignes en gobelet. Les vignes, souvent en francs de pied donc, y sont très espacées par rapports aux standards habituels. Cela signifie que le plus souvent la récolte se fait à la main. Il y a bien entendu des vins non artisanaux en Grèce, le vin bio n’y est pas majoritaire (il représente comme en France environ de 10% du vignoble), mais vous ne trouverez pas la queue d’un de ces vins standardisés le 29 mai. Les vignerons présents seront tous des artisans, qui produisent de 25 000 à 150 000 bouteilles par an.

 

« La Grèce est un pays très morcelé au niveau des vignes, et à part les vignobles récents créés dans les années 1980, il y a très peu de domaines d’un seul tenant avec de grandes parcelles, explique Georgios. Souvent les vignerons ont quelques hectares en propre, et ils cultivent en fermage des petites vignes, qui se trouvent dans le jardin de personnes âgées qui ne peuvent plus s’en occuper.

 

Le « Banquet » du 29 mai ne vous donnera donc pas une vue d’ensemble du vin grec en tant que tel, mais vous permettra de découvrir et de rencontrer certains des meilleurs artisans vignerons du pays.

 

DEUX CUVÉES À DÉGUSTER LE 29 MAI AU BANQUET :

 

Les vins résinés grecs ont longtemps été décriés, il en existe pourtant qui raviront les papilles de l’amateur le plus blasé. Issu du cépage autochtone roditis, ce blanc est sans doute ce qui se rapproche le plus de ce que buvaient les grecs de l’Antiquité. « À l’époque, on rajoutait de la résine dans les amphores pour qu’elle aide les bouchons à rester hermétiques et le vin à résister à l’oxydation, raconte Georgios. Mais il est difficile de dire avec certitude ce que buvaient nos ancêtres, car quatre siècles d’occupation ottomane ont détruit la plupart des traces écrites sur la viticulture grecque. » Aujourd’hui, de la résine de pin d’Alep est rajoutée dans les mouts lors de la fermentation, ce qui donne un vin blanc minéral, mais doté de notes d’herbes des montagnes, et donc, de résine.

 

Autre découverte : un vin de l’île de Santorin, dont le vignoble a la particularité d’être entièrement franc de pied, et le terroir, de reposer sur des roches volcaniques. Autre trait de caractère de ces vignes : les pieds sont conduits pour pousser à ras de terre, afin de résister au vent, et certains sont enroulés sur eux-mêmes afin que le tronc protège les raisins, selon la technique du gobelet en couronne. « Les vignes ont les pieds dans la lave, et les raisins absorbent la salinité des brumes qui montent de la mer, explique Georgios. Certains pieds de vignes ont plusieurs centaines d’années, mais bien sûr elles ne produisent que très peu. » Des influences terriennes et marines qui se retrouvent en bouche.